Contexte
Suite à la suspension officielle du décret Lebrun (cf. Partie 1), les coordinations étudiantes et le gouvernement doivent se mettre d’accord pour en retravailler une version II. Le climat est toujours tendu et la confiance des étudiant·es en ce dernier est loin d’être gagnée : « Oui à la négociation, mais sous haute surveillance et sous conditions ».
Évènements
Dès février 1995, trois points sont ciblés : l’établissement du calendrier des négociations en évitant les périodes d’examens, la primauté du pédagogique sur l’économique, et la détermination des critères précis de regroupement en Hautes Ecoles.
Les négociations s’appuient sur le travail participatif de dizaines de groupes de discussions décentralisés, faisant appel à l’intelligence collective. En parallèle, les manifestations estudiantines continuent dans toute la francophonie pour appuyer leurs réclamations.
Trois avancées majeures sont perceptibles dans la nouvelle mouture du décret : le projet pédagogique, social et culturel sous-tendant les regroupements ; la reconnaissance de la participation des étudiants dans les écoles supérieures ; et la souplesse introduite dans le processus de fusion. De plus, l’accord contient un autre acquis fondamental aux yeux des étudiants : des subsides sociaux seront également octroyés aux établissements du supérieur non-universitaire.
Néanmoins, cela n’est pas suffisant. La veille des élections législatives de mai 1995, c’est à un bilan global que la FEF convie les partis politiques, afin de repenser le secteur dans sa globalité : démocratisation de l’enseignement, participation des étudiant.e.s, qualité et évaluation de l’enseignement, formation des enseignants, financement, etc.
En août, le nouveau gouvernement de la Communauté Française de la Ministre Onkelinx trace les lignes directrices de sa politique en matière d’enseignement : regroupement forcé en Hautes Ecoles, fusion des écoles secondaires de moins de 400 élèves, réforme du financement de l’enseignement supérieur. Ces mesures, visant à faire des économies budgétaires, provoquent une recrudescence du mouvement de contestation. En octobre, 20.000 jeunes retrouvent le pavé à Liège, suivis par Bruxelles, Mons, Namur, et Charleroi. « Pour que la société change, il faut changer l’école, et pour changer l’école, il faut réinvestir ! »
Fin 1995, les manifestations tournent à l’affrontement avec les forces de l’ordre. Les négociations sont au point mort : le gouvernement réfléchit selon une logique des moyens, les étudiant·es selon une logique des besoins. Le dialogue semble définitivement rompu.
Impact
Le mouvement de contestation de 1995 remet l’ensemble du système éducatif en question. Il a aidé à visibiliser un problème global, à réveiller et surtout mobiliser la population étudiante.
Bien que n’ayant pas gagné sur tous les points de revendication, le mouvement a permis de limiter la politique d’austérité du gouvernement, et a encouragé le monde académique à continuer à lutter les années suivantes.
Source
Maron, F. (1996). Le Mouvement Etudiant. Courrier Hebdomadaire du CRISP. (1510-1511). pp. 1-53. DOI 10.3917/cris.1510.0001. En ligne https://www.cairn.info/revue-courrier-hebdomadaire-du-crisp-1996-5-page-1.htm